Témoignages

 

Témoignages issus du projet « Accès des Femmes à la Terre » (2011-2015)

Les témoignages suivants ont été recueillis entre 2011 et 2012 par RCN Justice & Démocratie et son partenaire local, l’association rwandaise HAGURUKA engagée dans la défense des droits des femmes et des enfants au Rwanda.

Ces paroles sont issues du projet « Accès des Femmes à la Terre » ( Beyond Raising Awareness : Shifting the Social Power Balance to Enable women to Access Land ), financé par l’Ambassade du Royaume de Suède au Rwanda et ONU Femmes-Fonds pour l’égalité des sexes.

L’action poursuit un double objectif : d’une part, renforcer les capacités des femmes rwandaises à réclamer, exercer et protéger leurs droits fonciers reconnus par la loi, et d’autre part, les soutenir pour une meilleure gestion de leurs terres.

1/ S. Claver habite dans le village de Nganzo, cellule Rwebeya, secteur de Cyuve. Avant de participer aux dialogues sur les droits fonciers des femmes, il était persuadé que tout le patrimoine foncier laissé par leurs parents devait n’appartenir qu’à lui seul : « J’ai une sœur mais je ne pouvais pas lui donner une portion de la terre laissée par nos parents parce qu’elle devait la recevoir chez son mari. Après la participation aux DV&DC [dialogues villageois et discussions communautaires], j’ai décidé de partager avec elle tout le patrimoine de nos parents et en parts égales » a-t-il affirmé.

2/ M. Espérance est mère de trois enfants et souffre du VIH. Elle vit dans le secteur Kamegeri, district Nyamagabe, au Sud du Rwanda. Au décès de ces parents, elle a été exclue de la succession : son frère a distribué la terre aux autres frères et à ses enfants, sous prétexte qu’Espérance était une femme, et qu’il ne lui restait que quelques mois à vivre. Elle a saisi les autorités de base qui ne l’ont pas rétablie dans ses droits. La parajuriste U. J. l’a mise en contact avec le juriste de HAGURUKA dans leur secteur. Il a rédigé des conclusions et l’a soutenue pour intenter une action en justice. Au regard de la vulnérabilité psychologique, médicale et matérielle de M. Espérance, et de la position de force de son frère, HAGURUKA a décidé de lui payer un avocat. M. Espérance a gagné le procès et a récupéré ses terres. D’ailleurs, les autorités de base ont proposé de lui construire une maison. Elle est en bonne santé et témoigne que c’est grâce à HAGURUKA si elle est toujours en vie.

3/ suite à son retour au Rwanda en 1997, MU. B. a reçu une propriété foncière dans le secteur de

KA.Sa. et le parajuriste dans la propriété récupérée.

KA.Sa. et le parajuriste dans la propriété récupérée.

Kamabuye, district Bugesera, province de l’Est. Dans le cadre de projets privés, un investisseur a décidé d’acheter les terres. Le prix a été négocié avec les différents propriétaires, et les autorités de base ont demandé à ce que la somme soit versée dans la caisse de la cellule. Au moment où elles ont remboursé les propriétaires, MU. B. était à l’hôpital. A son retour, le secrétariat exécutif de la cellule de Biharagu n’avait plus la somme qui devait lui être versée. Elle a donc essayé de réclamer ses droits à l’amiable. Le secrétariat exécutif devait soit lui rendre ses terres, soit lui en donner d’autres. Mais cet engagement n’a pas été tenu. Elle a fait part de ses problèmes au cours de cliniques juridiques mobiles, et a ensuite été soutenue par un juriste d’HAGURUKA. Décédée entre temps, sa fille KA. Sa. a poursuivi l’action avec l’aide d’un avocat. Suite à une médiation qui n’a pas abouti, ce dernier a opté pour une mise en demeure de l’investisseur, qui a finalement accepté de redonner la terre à KA. Sa.

Pour plus d’informations sur ce projet, cliquez-ici.

Témoignages

François-Xavier Nsanzuwera, ancien procureur rwandais et responsable de programme pour RCN Justice & Démocratie, Bruxelles, janvier 2005. Extrait d’entretien réalisé par Pascaline Adamantidis

« Quand la première mission [de RCN Justice & Démocratie] est venue vers moi, quand j’étais Procureur de la République, on ne m’a pas dit « nous allons faire ceci », on ne m’a pas dit « nous vous apportons ceci ». On m’a posé la question « en quoi est-ce qu’on peut aider ? ». Et je crois que dans tous les projets de RCN, il y a toujours eu ce souci de ne pas vouloir remplacer les acteurs nationaux mais plutôt de s’impliquer dans leur propre projet, dans leur propre programme et de les aider à finaliser, à avancer leur propre projet, leur propre programme. Je crois qu’il y a cette écoute de l’autre, de la personne qu’on va appuyer, qui est la méthode qui caractérise RCN. »

Aloysie Cyanzayire, à propos de la procédure d’aveu, Extrait d’un entretien réalisé par Pascaline Adamantidis Kigali, novembre 2004.

« Les victimes, la parole, ça guérit un peu le cœur, ça permet de dégager un peu ce qui est lourd sur votre cœur mais du côté des auteurs du génocide, des personnes qui sont poursuivies, ça permet aussi de dégager ce qui est lourd sur votre conscience. »

Un citoyen rwandais, Bulletin 1er trimestre 2004, Spécial Rwanda, p. 9

« 10 ans après le génocide…Un pas a été fait dans le domaine de l’unité et de la réconciliation et pour la reconstruction du Pays. Toutefois, beaucoup de choses restent à faire dans le domaine de la justice. Traiter les personnes sans dossier, accélérer la justice du génocide, vider les cachots. La justice permet de punir les coupables, relâcher les innocents, rétablir les victimes du génocide dans leurs droits (…). Aujourd’hui, je ne vis plus dans la peur, la sécurité est rétablie. Les camps de solidarité, la sensibilisation et l’éducation de la population assurés par les autorités permettent de combattre le germe du génocide, la mauvaise éducation. Celle qui permettait de voler une chèvre, un troupeau, une fortune ; puis de prendre une vie en toute impunité. La société rwandaise doit essayer d’éradiquer la culture de l’impunité et bâtir un état de droit où personne ne sera favorisé. »

 


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