Approche et principes d’intervention

Dernière mise à jour Avril 2025

1. Une approche basée sur les droits (« Rights Based approach »)

RCN J&D soutient les politiques de justice conformes aux normes internationales des droits humains et aux accords de paix (pour les situations post-conflit). Les interventions de RCN J&D visent à renforcer les capacités des détenteurs d’obligations à respecter, protéger et réaliser les droits des titulaires, dont les capacités seront aussi renforcées pour qu’iels sachent revendiquer et exercer leurs droits, mais également réclamer la redevabilité des détenteurs d’obligations.

2. La transformation sociétale

L’efficacité de la justice s’apprécie au regard de sa capacité à prendre en considération des revendications « nouvelles » (écologique, féministe, décoloniale…), ainsi que des phénomènes de violence et de discrimination ayant longtemps été déniés, minorés ou invisibilisés par les institutions étatiques, les acteurs économiques et/ou les sociétés elles-mêmes (violences basées sur le genre, passé et présent colonial, racisme systémique, inceste etc.). La justice doit prendre sa part pour faire cesser ces violences et discriminations, mais aussi pour en prévenir la répétition. Dans ce cas, les institutions et les politiques de justice doivent souvent se transformer elles-mêmes pour pouvoir traiter à leur juste mesure ces enjeux.

3. La justice de proximité

Sans être reconnu expressément par les conventions ou normes internationales, ce concept a été développé pour indiquer la nécessité de rapprocher l’institution de la justice du justiciable. En l’utilisant d’abord dans les pays en développement ou post-conflit puis en Belgique, RCN J&D a développé sa propre définition de la justice de proximité, laquelle comprend les composantes suivantes : une proximité dans le temps (justice rendue dans un délai raisonnable), dans les moyens (abordable financièrement pour les citoyens), dans l’espace (accessibilité géographique), en légitimité et par la participation des citoyen·nes. Pour répondre aux besoins des justiciables et assurer le droit à la justice, l’institution justice doit donc aller bien au-delà d’une amélioration de l’accès à la justice via l’assistance judiciaire ou l’aide juridique.

4. La contextualisation

Les politiques de justice doivent prendre en compte le contexte social, économique et culturel du pays en question, ainsi que les besoins et aspirations des populations. Ce principe d’intervention de RCN J&D est conforme à la politique d’engagement international dans les Etats fragiles, ainsi que dans les directives des Nations Unies sur la Justice Transitionnelle.Au lieu d’imposer des modèles clé en main, notre volonté est de se baser sur des analyses multidisciplinaires du contexte, y compris de l’interconnexion entre la fragilité et les risques de conflit. Les politiques de justice doivent aussi être cohérentes et complémentaires avec les politiques d’autres secteurs, en lien avec la justice (sécurité, affaires intérieures, agriculture, migration, politique familiale, éducation etc.)

5. La décolonialité

Il est impérieux d’analyser et de déconstruire les héritages coloniaux, y compris dans le domaine de la justice. Pour questionner les politiques et les institutions de justice, RCN J&D s’appuie sur plusieurs leviers : la valorisation des savoirs et des épistémologies du Sud global en affirmant leur légitimité face aux connaissances « hégémoniques » du Nord, la reconnaissance des violences systémiques issues de la colonisation et leur persistance actuelle dans un « présent colonial », ainsi que la nécessité de donner la voix aux récits marginalisés par la persistance de ces héritages. RCN J&D reconnait aussi la décolonialité comme un processus interne, global et progressif qu’elle doit s’appliquer à elle-même pour faire évoluer son vocabulaire, son imaginaire, son fonctionnement interne, ses relations partenariales et sa communication.

6. Le pluralisme juridique

En Afrique, la population a fréquemment recours aux mécanismes non judiciaires pour la résolution de ses conflits quotidiens ou liés aux violences armées. Souvent la justice judiciaire n’intervient qu’en dernier lieu, lorsqu’aucun accord n’a pu être trouvé. La complémentarité et la pluralité des mécanismes, d’acteur·ices et de valeurs de la justice (ou « pluri-juridisme ») est une réalité que ces mécanismes soient reconnus par l’Etat ou non. RCN J&D prend donc en considération la réalité des pratiques et mécanismes de justice qui existent sur les territoires, et les considère comme un mode valable de règlement de conflits, à condition qu’ils soient conformes aux standards des droits humains.

7. Une approche féministe et intersectionnelle

RCN J&D reconnait que les inégalités de genre sont interconnectées avec d’autres formes de discriminations notamment basées sur l’origine ethnique, la classe sociale, etc.  Dans le domaine de la justice cela nous amène à: (a) soutenir l’accès à des systèmes et réponses de justice pour toutes et tous, qui prennent en compte non seulement les expériences de genre, mais aussi leurs imbrications avec les autres systèmes de domination et d’exclusion ; (b) contribuer à la déconstruction des normes et pratiques discriminantes et oppressives que les systèmes de justices peuvent reproduire ; (c) repenser la justice comme un levier de transformation sociétale qui interroge et modifie les structures sous-jacentes qui perpétuent ces inégalités et ces discriminations.

Consultez ici notre politique genre.

8. Une justice centrée sur les personnes (« People-centered justice »)

RCN J&D promeut une approche empirique qui consiste à placer les individus au centre des systèmes de justice en mettant l’accent sur la résolution des problèmes de justice considérés par la population comme les plus importants, la prévention des conflits et l’investissement dans des systèmes et institutions de justice œuvrant pour les personnes et dotées des capacités pour répondre à leurs besoins de justice. L’accès à la justice n’est plus centré sur les questions strictement liées au système judiciaire, il est axé sur les perspectives de l’utilisateur·ice du système de justice et les problèmes juridiques quotidiens vécus par la population, ce qui inclut en particulier la prévention et le règlement amiable des conflits.